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49 - PLANTER DES ARBRES ET GERER LES SOLS POUR SEQUESTRER DU CARBONE

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Earth Policy Institute
Extrait du livre Plan B 3.0
Pour diffusion Immédiate, le 30 Décembre 2008

PLANTER DES ARBRES ET GERER LES SOLS POUR SEQUESTRER DU CARBONE

Lester R. Brown, traduit par Frédéric Jouffroy

texte original:
http://www.earthpolicy.org/Books/Seg/PB3ch08_ss6.htm

 

Depuis 2007, la déforestation dans les régions tropicales a provoqué l’émission de 2,2 milliards de tonnes de carbone par an. Dans le même temps, la reforestation dans les régions tempérées a absorbé 0,7 milliards de tonnes de carbone par an. Au total, c’est quelque 1,5 milliards de tonnes de carbone qui sont relâchées dans l’atmosphère chaque année, contribuant au réchauffement climatique.

La déforestation tropicale en Asie est d’abord due à la demande en croissance rapide pour le bois. Par contraste, en Amérique Latine, c’est la demande grandissante pour le soja et le bœuf qui déforeste l’Amazone. En Afrique, elle est principalement due à l’association de l’utilisation du bois comme combustible et du défrichement de nouvelles terres pour l’agriculture, à mesure que les champs existants se dégradent et sont abandonnés. Deux pays, l’Indonésie et le Brésil, totalisent plus de la moitié de la déforestation totale. La République Démocratique du Congo, également haut placée dans la liste, est un état défaillant, ce qui rend difficile la gestion de la forêt.

Le volet du plan B sur la stabilisation du climat comporte des actions pour en finir avec la déforestation à l’échelle globale, et pour séquestrer le carbone grâce à diverses mesures de plantation d’arbres et à l’adoption de pratiques de gestion améliorées des terres agricoles. Aujourd’hui, parce que les forêts de la terre se réduisent, elles sont une source majeure d'émissions de CO2. L’objectif est d’étendre la couverture des forêts sur la terre, en faisant pousser plus d’arbres pour absorber le CO2.

Bien que l’interdiction de déforester puisse sembler irréaliste, des raisons environnementales ont poussé trois pays (Thaïlande, Philippines et Chine) à mettre en en œuvre des interdictions totales ou partielles d’exploitation forestière. Ces trois interdictions furent toutes imposées à la suite d’inondations et de coulées de boues dévastatrices résultant de la perte du couvert forestier. Après avoir subi des pertes record dues à plusieurs semaines d’inondations ininterrompues dans le bassin du fleuve Yangtze, Pékin a constaté, en considérant la politique forestière, non pas du point de vue de l’exploitant forestier individuel, mais de celui de la société dans son ensemble, que cela n’avait simplement pas de sens, du point de vue économique, de continuer à déforester. Le service rendu de régulation des inondations valait, d’après eux, trois fois le bois issu des coupes d’arbres. Avec ceci en tête, Pékin prit la mesure peu commune de payer les exploitants forestiers pour qu’ils deviennent des planteurs d’arbres, pour reforester au lieu de déforester.

Les autres pays défrichant d'importantes surfaces boisées seront aussi confrontés aux effets environnementaux de la déforestation, y compris les inondations. Si la forêt équatoriale Amazonienne du Brésil continue à se réduire, elle peut aussi continuer à se dessécher, devenant vulnérable au feu. Si la forêt Amazonienne disparaît, elle sera largement remplacée par le désert et les broussailles. La capacité de la forêt équatoriale à retenir l’eau vers l’intérieur du pays, y compris vers les zones agricoles du sud seront perdues. A ce moment là, une calamité environnementale locale à évolution rapide deviendrait un désastre économique, et parce que la combustion de l’Amazone relâcherait des milliards de tonnes de carbone dans l’atmosphère, cela accélérerait le réchauffement global.

De la même manière que les préoccupations nationales relatives aux effets de la poursuite de la déforestation éclipsent finalement les intérêts locaux, l’intérêt global commence maintenant à prendre le pas sur les intérêts nationaux car la déforestation est devenu un des facteurs majeurs du réchauffement climatique. La déforestation n’est plus seulement une cause d’inondations locales, mais aussi d’augmentation du niveau des mers à l’échelle de la planète, et des nombreux autres effets du changement climatique. La nature a fait grimper l’enjeu de la protection des forêts.

Atteindre l’objectif de zéro déforestation nette exigera de réduire les pressions entraînant la déforestation venant de l’accroissement de la population, de l’augmentation du niveau de vie, de la construction de distilleries d’éthanol et de raffineries de bio-diesel, et de l’utilisation en croissance rapide du papier. Protéger les forêts de la terre veut dire arrêter la croissance démographique dès que possible, et pour les habitants riches de la planète qui sont responsables de la demande croissante en bœuf et soja qui déforestent le bassin de l’Amazone, cela veut dire redescendre dans la chaîne alimentaire. Une interdiction de déforester couronnée de succès peut exiger l’interdiction de construire de nouvelles raffineries de bio-diesel et distilleries d’éthanol.

Sur cette toile de fond de préoccupations grandissantes concernant les relations entre forêt et climat, une importante société suédoise du secteur de l’énergie, Vattenfall, a étudié le potentiel à large échelle de reforestation des terres à l’abandon, pour séquestrer du dioxyde de carbone. Ils ont commencé en constatant qu’il y a 1,86 milliards d’hectares de terres dégradées dans le monde, terres qui furent autrefois des forêts, destinées à la culture ou des prairies, et que la moitié de cette surface soit 930 millions d’hectares a une chance convenable d’être réhabilitée avec profit. Près de 840 millions d’hectares de ce total se situent dans les régions tropicales, où la réhabilitation entraînerait des taux bien plus importants de séquestration de carbone

Vantenfall estime que le potentiel maximum technique de ces 930 millions d’hectares est l’absorption annuelle d’environ 21.6 milliards de tonnes de CO2. Si, comme élément de la stratégie globale de stabilisation du climat, la séquestration de carbone était évaluée à 210 dollars la tonne, la compagnie pense que 18 pour cent de ce potentiel technique pourrait être réalisé. Cela correspondrait à replanter en arbres 171 millions d’hectares de terre. Cette surface (plus importante que celle consacrée aux céréales en Inde) séquestrerait 3,5 milliards de tonnes de CO2 par an, ou plus de 950 millions de tonnes de carbone. Le coût total de la séquestration de carbone, à 210 dollars par tonne, serait de 200 milliards de dollars. Réparti sur une décennie, cela voudrait dire investir 20 milliards de dollars par an, afin de donner un grand (et potentiellement décisif) coup d’accélérateur à la stabilisation du climat. Ce plan global de reforestation pour supprimer le CO2 atmosphérique serait financé par les pays industrialisés responsables en grande partie de sa production. Une organisation indépendante serait mise sur pied pour administrer, financer et surveiller cet important programme de plantation d’arbres.

A côté de l’idée de reforestation de Vantenfall, il y a déjà beaucoup d’initiatives de plantation d’arbres en projet, guidées par diverses préoccupations, du changement climatique à l’expansion des déserts, à la conservation des sols, ou à l’amélioration des conditions de vie dans les villes. Fin 2006, le Programme des Nations Unies pour l'environnement, inspiré par le Prix Nobel de la Paix Wangari Maathai, a annoncé les plans pour un effort mondial en vue de replanter un milliard d’arbres en un an pour combattre le réchauffement climatique. Cet objectif initial a été facilement dépassé et, à la mi 2008, plus de 2 milliards d’arbres avaient été plantés dans plus de 150 pays. Le nouveau but est d’avoir 7 milliards d’arbres plantés à la fin 2009 – soit au moins un arbre par personne vivant sur la planète.

De nombreuses pratiques agricoles peuvent aussi accroître la quantité de carbone stocké comme matière organique dans les sols. Les pratiques fermières qui réduisent l’érosion des sols et augmentent la productivité des récoltes conduisent aussi habituellement à des concentrations plus élevées de carbone dans les sols. Parmi celles-ci, il y a le passage du labourage conventionnel au labourage minimum ou à sa suppression, l’usage accru des cultures de protection, le retour complet du fumier de bétail ou de volailles sur les terres, l’expansion des zones irriguées, un retour à une agriculture plus combinée moissons-élevage, et la reforestation des terres à faible rendement.

Ratan Lal, un agronome très expérimenté du Centre de Gestion et Séquestration de Carbone de l’Université de l’Ohio a calculé l’éventail des potentiels de séquestration de carbone pour chacune des nombreuses pratiques disponibles, comme celles citées ci-dessus. Par exemple, étendre l’utilisation des cultures de protection pour préserver le sol à l’intersaison peut stocker de 68 millions à 338 millions de tonnes de carbone à l’échelle mondiale chaque année. Le total calculé de séquestration de carbone pour les pratiques qu’il cite, montre un potentiel de séquestration annuel de 400 millions de tonnes au minimum, et de 1,2 milliards de tonnes dans l’hypothèse la plus optimiste. Pour notre budget carbone nous prenons l’hypothèse, peut-être conservatrice, que 600 millions de tonnes de carbone peuvent être séquestrées par l’adoption de ces pratiques ‘carbo-sensibles’ de fermage et de gestion des terres.

Arrêter la déforestation globale et séquestrer le carbone comme décrit ci-dessus nous mettra sur la voie de l’objectif de stabilisation du climat du plan B qui est de réduire de 80% les émissions effectives de carbone d’ici 2020. Pour voir comment l’augmentation de l’efficacité énergétique et l’exploitation des sources d’énergie renouvelables complètent le tableau, voir le plan directeur de l’Earth Policy Institute sur la réduction de carbone http://www.earthpolicy.org/Books/PB3/80by2020.htm, ou sa traduction française effectuée par l’association Alternative Planétaire, disponible à l’adresse suivante http://www.alternativeplanetaire.com/sites/alternativeplanetaire.com/files/docs/Objectif80.pdf

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Adapté du Chapitre 8, "Restoring the Earth" ("Restaurer la Terre", ndlt) du Plan B 3.0 : Mobilizing to Save Civilization (Se Mobiliser pour sauver la civilisation, ndlt) de Lester Brown (New York: W.W. Norton & Company, 2008), disponible en téléchargement gratuit et à l'achat sur:
http://www.earthpolicy.org/Books/PB3/index.htm.


Information complémentaire: www.earthpolicy.org

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